Daniel Bensaid, profersseur de philosophie à Paris VIII est venu nous parler de son nouvel ouvrage : Les dépossédés. Karl Marx, les voleurs de bois et le droit des pauvres, Paris, La Fabrique, 2007. En voici le compte rendu.
En 1842, Marx écrit une série d’articles sur la propriété dans La Gazette rhénane. C’est vraisemblablement ici, que Marx s’intéresse pour la première fois en profondeur, à des problèmes économiques.Comme en France, (ou dans de nombreux autres pays) le droit coutumier de ramassage de bois mort existe en Rhénanie. Le parlement de cette région décide d’interdire ce ramassage en 1842. On criminalise un droit coutumier et on redéfini le statut de propriété. On assite au passage d'un bien commun à un bien privé.De plus il est important de noter que c'est dans le contexte d’industrialisation que la propriété est mis en débat, déjà en 1840 Proudhon écrit son fameux texte : Qu’est-ce que la propriété ?
Dans ces articles, Marx veut qualifier les « formes hybrides » de propriété et définir ainsi ce qui est privatisable. Il étudie le changement du statut économique du bois, qui devient une marchandise au sens moderne. La conséquence est tout évidente, il s’agit de la paupérisation des populations locales suite à ce renforcement juridique.Marx est également choqué par le mécanisme de sanctions qui est alors employée lors d’un litige : c’est la parole du garde-chasse (employés du propriétaire) qui prévaut juridiquement. Si un individu est condamné, il doit accomplir sa peine au service du propriétaire. L’État se met donc au service des propriétaires sur le plan juridique.
Ce qui est en jeu s’est une nouvelle définition de la propriété. Notre époque est celle de restauration de la réaction ou un nouveau rapport social se joue. Le monde se privatise (services publics, entreprises publiques, accords AGCS de l’OMC…). Cela touche tous les domaines, l’État perd même son monopole de violence légitime au profit de la violence privée (un quart des troupes américaines en Irak sont des mercenaires). L’espace est lui-même privatisé, des systèmes de rue privée ou de quartiers privés sont mis en place un peu partout. Le savoir n’échappe pas non plus à cette logique, on confond les découvertes qui appartiennent à la nature et les inventions brevetables. Partout il y a une redéfinition du domaine privatisable. On assiste à une nouvelle définition du privé et du public.
À ceux qui se demandent si Marx est encore d’actualité, nous pouvons répondre ceci : le capitalisme est plus important aujourd’hui qu’il ne l’a été donc celui qu’il l'a compris doit être d’autant plus important (et donc écouté) aujourd’hui qu’il ne l’a été. A ceux qui se demandent si le marxisme est en crise, nous répondons qu’il n’y a aucune crise théorique du marxisme, que la seule crise du marxisme qui existe est purement politique à travers les figures concrètes de tel ou tel parti, crise qui est d’autant plus relayé par les médias aux mains de la bourgeoisie.
Il existe une idée forte du communisme qui ne s’arrête pas à l’effondrement des politiques communistes.
L’inquisition n’a pas tué le christianisme…
lundi 17 décembre 2007
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