mercredi 2 janvier 2008

A lire...

Orlando FIGES, La Révolution russe, 1891-1924. La tragédie d'un peuple, Denoël, 2007, 1106 p.
Véritable fresque historique, le livre d’Orlando Figes (qui enseigne l’histoire de l’URSS à l’université de Londres) se lit comme un roman. Il s’agit bien cependant d’un livre d’histoire.

Sur un plan factuel les principaux événements étaient connus, l’ouvrage, publié il y a dix ans dans le monde anglophone, ayant été déjà abondamment lu et utilisé. Il faut dire que l’auteur a puisé aux meilleures sources, puisque entre 1991 et 1994 les archives ex-soviétiques étaient presque totalement ouvertes. Ainsi, il s’appuie sur les journaux intimes, souvent saisis par la Tcheka, et donne corps à l’histoire à travers des destinées individuelles.

Une autre raison de lire l’ouvrage d’Orlando Figes est qu’il rompt avec les interprétations traditionnelles. Il replace l’histoire de la révolution dans le long terme, commençant son récit avec la famine de 1891 et le concluant avec la fin de la famine de 1921-1922. Il jette un regard novateur sur certains aspects minorés : l’incapacité du pouvoir impérial à se réformer, qui refuse non seulement le jeu parlementaire mais aussi toute forme de partage du pouvoir, même à l’échelle locale.

Il propose une analyse minutieuse de la paysannerie : celle qui aurait dû être la grande bénéficiaire de la révolution en devint la principale victime. Les bolcheviks utilisèrent tour à tour deux méthodes à l’égard des paysans : la promotion - par les décrets sur la terre, par l’alphabétisation... - et la répression - par la famine -, dès le début de l’année 1918.

Enfin, Orlando Figes montre comment les bolcheviks ont su capter le potentiel de violence et le canaliser à leur profit contre le reste de la population. Notamment grâce à l’institution de la Tcheka, fondée en 1918 pour lutter contre la contre-révolution et dont les actes frappent d’abord les paysans et les ouvriers. Cette pratique est bien née sous Lénine, Staline en digne héritier a su la réutiliser systématiquement.

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