INTERVIEW
A l'occasion du rapport sur le mal-logement, Bernard Devert, président de l'association Habitat et Humanisme, évoque les problèmes de logement auxquels sont confrontés de plus en plus de personnes âgées.
Recueilli par MARIE PIQUEMAL
Devert fondait l’association Habitat et Humanisme. Depuis, entouré de 2000 bénévoles et 160 salariés, il aide des personnes en difficulté à se loger. A l'occasion de la publication du rapport sur le mal-logement de la Fondation Abbé Pierre, il apporte son expertise d'acteur de terrain.
Que faut-il retenir de cet épais rapport sur le mal-logement publié aujourd’hui par la Fondation Abbé Pierre?
Il y a un point qui me paraît essentiel: la question des retraités pauvres. Voilà un problème de société devenu majeur aujourd’hui. (Selon le rapport, 600.000 personnes âgées vivent avec une allocation de solidarité de 628 euros, et donc sous le seuil de pauvreté, NDLR). Sur le terrain, c’est très net: on rencontre de plus en plus de personnes âgées confrontées à de réelles difficultés pour se loger. J'ai plein d'exemples en tête. Comme ce Lyonnais de 62 ans qui souhaitait être placé en maison de retraite médicalisée alors que la moyenne d’âge est de 89 ans. Voyant ma surprise, voilà ce qu’il m’a répondu: «Tant pis pour mon indépendance. Mais, au moins j’aurais un toit pour dormir...» Ce genre de situation est complètement nouvelle.
Vous voulez dire que les personnes âgées étaient épargnées de la précarité jusqu'ici?
Vous voulez dire que les personnes âgées étaient épargnées de la précarité jusqu'ici?
A la sortie de la seconde guerre mondiale, de nombreux retraités se sont retrouvés dans des situations difficiles, obligeant les pouvoirs publics à intervenir. Mais, là, depuis dix-huit mois, on constate une augmentation du nombre de retraités démunis. Il y a dix ans, on parlait surtout de «travailleurs pauvres», aujourd'hui, on a rajouté: «retraités pauvres»
Comment expliquez-vous que de plus en plus de retraités vivent en dessous du seuil de pauvreté ?
Comment expliquez-vous que de plus en plus de retraités vivent en dessous du seuil de pauvreté ?
C'est d’abord une histoire de génération: à la différence de leurs aînés, les tout nouveaux retraités ont vécu des périodes de chômage ou des «trous» dans leur carrière. Résultat, à la sortie, ils ont de faibles retraites...
Autre explication, valable pour tout le monde: les salaires (et encore plus les pensions de retraite) ne suivent pas l'augmentation des loyers. Il y a un décrochage évident.
Quelles mesures faut-il prendre pour résoudre le problème?
Autre explication, valable pour tout le monde: les salaires (et encore plus les pensions de retraite) ne suivent pas l'augmentation des loyers. Il y a un décrochage évident.
Quelles mesures faut-il prendre pour résoudre le problème?
Soutenir la construction d’abord. Mais pas seulement. Il faut aussi penser autrement l’acte de construction.
Que voulez-vous dire ?
Que voulez-vous dire ?
Dans notre association, un groupe d’étude (composé de sociologues, urbanistes, assistantes sociales et architectes) réfléchit à des pistes pour mieux loger les personnes âgées. Ainsi, la colocation peut être une solution qui permettrait aussi de résoudre le problème de la solitude, caractéristique des personnes âgées.
Il faut aussi encourager la mobilité au sein du parc HLM. De nombreuses personnes âgées se retrouvent dans des logements sociaux bien trop grands -et souvent inadaptés- à leur état. Aussi surprenant que cela puisse paraître, en France, changer de logement pour un plus petit revient parfois plus cher!
Enfin, notre association se bat pour encourager la mixité dans les programmes immobiliers : il faut mélanger les catégories sociales mais aussi faire en sorte d’avoir des personnes de tout âge dans les immeubles. Il ne faut pas parquer les personnes âgées. D’ailleurs, si on commençait par arrêter de considérer la vieillesse comme une maladie, ce serait déjà un premier pas...
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